Dans le cadre de sa formation, Rodrigo, frère de Taizé depuis 3 ans, passe un an dans un foyer de L'Arche des Trois Fontaines. Point d'étape après 6 mois.
Il y a maintenant six mois que je suis arrivé à la Communauté de L’Arche « Les Trois Fontaines » à Ambleteuse, près de Boulogne sur mer. Dès les premiers instants, j’ai eu l’impression d’entrer dans une famille plutôt qu’une institution. L’ambiance est familiale, très agréable.
J’ai découvert que la résolution des problèmes est portée d’une manière évangélique plutôt qu’institutionnelle, même si cette dimension doit-être également présente. Je me suis senti de la communauté dès mon arrivée et je sens que tous les membres m’ont accueilli très chaleureusement.
A L’Arche, il est difficile d’agir ainsi et de paraître…les masques tombent rapidement.
Nous avons aussi tendance à nous accomplir en faisant plaisir aux autres. Là aussi à L’Arche cette tentation n’a pas de place. L’Arche est un bon lieu pour « purifier l’esprit » selon l’expression religieuse. Et je peux dire que je suis en train de passer par une très bonne « purification » dans le bon sens du terme.
Une fois que les masques commencent à tomber, la vie commune peut alors à se déployer dans toute sa splendeur.
A L’Arche, le service des uns envers les autres rend la vie de chaque jour plus vraie. Le fait d’aider et de se laisser aider par les personnes en situation de handicap en est une bonne illustration. La relation se veut égale et non d’assistance. Accueillir l’aide des personnes c’est d’une certaine façon contribuer à restaurer leur dignité qui est parfois malmenée dans notre société.
Cependant je n’étais qu’au début de mes découvertes…
J’ai eu le privilège de participer aux JMJ en Pologne avec un groupe de la communauté. A cette occasion, j’ai été amené à accompagner une personne en situation de handicap, nous formions un binôme. Jusqu’alors je n’avais jamais été en situation d’accompagnement. J’ai donc dû agir en « assistant » sans l’avoir demandé. Cette situation qui s’est d’une certaine façon imposée à moi m’a permis de découvrir le cœur de L’Arche : la relation gratuite. Je me suis retrouvé face à une personne qui a commencé peu à peu à me faire confiance, qui n’a pas eu peur de s’ouvrir à moi, qui n’a pas mis une distance calculée vis-à-vis de moi, mais qui s’est en quelque sorte « donnée » à moi. Cette expérience m’a mis debout. Elle m’a permis à mon tour de m’ouvrir davantage, sans peur, confiant de savoir que je peux me donner tel que je suis, sans chercher l’approbation des autres.
L’expérience spirituelle vécue lors des JMJ était aussi étonnante. J’ai découvert une spiritualité à la fois simple et profonde. Une spiritualité incarnée dans une humanité profonde. Une spiritualité qui ne cherche pas la grandeur morale, l’accomplissement de la loi ou la perfection doctrinale, mais une spiritualité qui prêche la gratuité de l’amour de Dieu, sa miséricorde infinie.
Une spiritualité qui ne condamne pas nos blessures, mais qui nous aide à nous réconcilier avec elles. Une spiritualité qui nous invite à ne pas avoir peur de notre humanité mais à nous savoir aimés de Dieu tel que nous sommes, dans la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Bien sûr c’est Son amour qui nous transforme de l’intérieur, c’est la Grâce qui guérit, et c’est Dieu qui prend l’initiative. Nous devons seulement nous laisser faire.
Sur ce point, la spiritualité de L’Arche ressemble à la spiritualité de la Communauté de Taizé.
C’est pour cela que cette expérience aux Trois Fontaines est en train de confirmer ma vocation, non seulement comme religieux, mais aussi comme frère de Taizé. Je découvre comment être près des plus pauvres, tel que frère Roger le voulait pour ses frères, pour la communauté de Taizé. Aussi, ma prière devient concrète, pleine de visages. Cette année j’apprends également à être disponible, à être souple, à rendre service là où on a besoin. Ce qui fait l’essentiel de mon expérience et qui confirme le plus ma vocation, c’est qu’entre la Communauté de Taizé et la Communauté de L’Arche il y a une manière commune de comprendre et de vivre l’Évangile, chacun selon sa mission, mais l’essence est la même. C’est ce dont j’ai parlé avec Jean Vanier lorsque j’ai eu le privilège de le rencontrer.
Mon expérience à L’Arche est un cadeau. Elle témoigne d’une amitié tissée au fil des années entre nos communautés qui continue de grandir dans le secret, sans qu’on sache vraiment comment. C’est un peu comme la levure qui fait lever la pâte.
Je suis sûr que de cette expérience qui ne fait que commencer je vais encore beaucoup apprendre.
Frère Rodrigo, Communauté de Taizé
Ce premier récit est écrit après 6 mois à L’Arche, à mi-parcours de mon séjour."
Il y a maintenant six mois que je suis arrivé à la Communauté de L’Arche « Les Trois Fontaines » à Ambleteuse, près de Boulogne sur mer. Dès les premiers instants, j’ai eu l’impression d’entrer dans une famille plutôt qu’une institution. L’ambiance est familiale, très agréable.
J’ai découvert que la résolution des problèmes est portée d’une manière évangélique plutôt qu’institutionnelle, même si cette dimension doit-être également présente. Je me suis senti de la communauté dès mon arrivée et je sens que tous les membres m’ont accueilli très chaleureusement.
Etre simplement soi-même sans porter des masques de « bonté » ou « bonheur » tout le temps.
Je n’avais jamais rencontré en profondeur une personne en situation de handicap mental. Je me suis trouvé rapidement en difficulté dans la vie au foyer. En effet, je voulais me montrer toujours au service, souriant et faire bonne figure. Mais je me suis fatigué. Et un jour, alors que j’étais un peu découragé, j’ai reçu un câlin d’une des personnes du foyer. Je me suis senti soulagé et heureux d’être soutenu par une « personne accueillie ». C’est à travers cette expérience que j’ai commencé à découvrir ce qui fait la richesse de L’Arche : être simplement soi-même sans porter des masques de « bonté » ou « bonheur » tout le temps.
Depuis les 3 ans que je suis engagé dans la Communauté de Taizé, j’ai appris à me donner de plus en plus au service des autres. J’ai aussi découvert qu’il y a toujours chez l’être humain un désir ou un besoin d’être considéré comme une « bonne personne » par les autres.A L’Arche, il est difficile d’agir ainsi et de paraître…les masques tombent rapidement.
Nous avons aussi tendance à nous accomplir en faisant plaisir aux autres. Là aussi à L’Arche cette tentation n’a pas de place. L’Arche est un bon lieu pour « purifier l’esprit » selon l’expression religieuse. Et je peux dire que je suis en train de passer par une très bonne « purification » dans le bon sens du terme.
Une fois que les masques commencent à tomber, la vie commune peut alors à se déployer dans toute sa splendeur.
A L’Arche, le service des uns envers les autres rend la vie de chaque jour plus vraie. Le fait d’aider et de se laisser aider par les personnes en situation de handicap en est une bonne illustration. La relation se veut égale et non d’assistance. Accueillir l’aide des personnes c’est d’une certaine façon contribuer à restaurer leur dignité qui est parfois malmenée dans notre société.
Cependant je n’étais qu’au début de mes découvertes…
J’ai eu le privilège de participer aux JMJ en Pologne avec un groupe de la communauté. A cette occasion, j’ai été amené à accompagner une personne en situation de handicap, nous formions un binôme. Jusqu’alors je n’avais jamais été en situation d’accompagnement. J’ai donc dû agir en « assistant » sans l’avoir demandé. Cette situation qui s’est d’une certaine façon imposée à moi m’a permis de découvrir le cœur de L’Arche : la relation gratuite. Je me suis retrouvé face à une personne qui a commencé peu à peu à me faire confiance, qui n’a pas eu peur de s’ouvrir à moi, qui n’a pas mis une distance calculée vis-à-vis de moi, mais qui s’est en quelque sorte « donnée » à moi. Cette expérience m’a mis debout. Elle m’a permis à mon tour de m’ouvrir davantage, sans peur, confiant de savoir que je peux me donner tel que je suis, sans chercher l’approbation des autres.
L’expérience spirituelle vécue lors des JMJ était aussi étonnante. J’ai découvert une spiritualité à la fois simple et profonde. Une spiritualité incarnée dans une humanité profonde. Une spiritualité qui ne cherche pas la grandeur morale, l’accomplissement de la loi ou la perfection doctrinale, mais une spiritualité qui prêche la gratuité de l’amour de Dieu, sa miséricorde infinie.
Une spiritualité qui ne condamne pas nos blessures, mais qui nous aide à nous réconcilier avec elles. Une spiritualité qui nous invite à ne pas avoir peur de notre humanité mais à nous savoir aimés de Dieu tel que nous sommes, dans la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Bien sûr c’est Son amour qui nous transforme de l’intérieur, c’est la Grâce qui guérit, et c’est Dieu qui prend l’initiative. Nous devons seulement nous laisser faire.
Sur ce point, la spiritualité de L’Arche ressemble à la spiritualité de la Communauté de Taizé.
C’est pour cela que cette expérience aux Trois Fontaines est en train de confirmer ma vocation, non seulement comme religieux, mais aussi comme frère de Taizé. Je découvre comment être près des plus pauvres, tel que frère Roger le voulait pour ses frères, pour la communauté de Taizé. Aussi, ma prière devient concrète, pleine de visages. Cette année j’apprends également à être disponible, à être souple, à rendre service là où on a besoin. Ce qui fait l’essentiel de mon expérience et qui confirme le plus ma vocation, c’est qu’entre la Communauté de Taizé et la Communauté de L’Arche il y a une manière commune de comprendre et de vivre l’Évangile, chacun selon sa mission, mais l’essence est la même. C’est ce dont j’ai parlé avec Jean Vanier lorsque j’ai eu le privilège de le rencontrer.
Mon expérience à L’Arche est un cadeau. Elle témoigne d’une amitié tissée au fil des années entre nos communautés qui continue de grandir dans le secret, sans qu’on sache vraiment comment. C’est un peu comme la levure qui fait lever la pâte.
Je suis sûr que de cette expérience qui ne fait que commencer je vais encore beaucoup apprendre.
Frère Rodrigo, Communauté de Taizé
Ce premier récit est écrit après 6 mois à L’Arche, à mi-parcours de mon séjour."
Oct. 2016